Pourquoi la Chine et les États-Unis demeurent interdépendants malgré les tensions

Concessions et cadre des négociations sino‑américaines

Les annonces préliminaires de Washington évoquent la possibilité pour Pékin d accroître les achats de soja américain, de suspendre pendant un an le contrôle renforcé sur les exportations de terres rares et de céder à un propriétaire américain les activités américaines de TikTok. En échange, les États‑Unis envisageraient, pour le moment, de ne pas imposer de nouvelles taxes douanières.

Pour l’historien François Godement, conseiller pour l’Asie et les États‑Unis à l’Institut Montaigne, il s’agit d’un compromis prudent. « Auparavant, la Chine ne lâchait rien », résume-t-il.

Des concessions modestes et le poids des terres rares

Les concessions de Pékin restent limitées. Selon Godement, les demandes américaines apparaissent réduites par rapport à l’objectif initial de rééquilibrage de la balance commerciale, notamment face aux menaces liées aux semi‑conducteurs.

Le spécialiste rappelle que la Chine demeure dépendante de ses marchés occidentaux, tout en disposant d’outils économiques importants, notamment dans le domaine des terres rares, essentielles à l’industrie numérique et à la défense. « Elle raffine 90 % de la production mondiale. Remplacer ce volet, tant dans l’extraction que dans le raffinage, prendrait des années. » Ces matières jouent un rôle clé pour l’industrie militaire, faisant de cette dépendance une arme de dissuasion majeure pour les États‑Unis et l’Europe.

Taïwan et les positions américaines

Sur Taïwan, Pékin souhaite que Washington clarifie sa position. Selon Godement, la Chine demande une critique plus nette et publique des positions du gouvernement taïwanais lorsque celui‑ci semble s’orienter vers l’indépendance.

Il rappelle néanmoins que le président taïwanais actuel ne parle pas d’indépendance et que l’objectif de Pékin demeure d’amener Taïwan à négocier sous pression. Quant à l’idée d’un abandon américain en cas d’invasion, il la juge prématurée: « On n’en est pas encore là ».

Amérique latine, un champ discret du duel sino‑américain

La rivalité s’étend aussi en Amérique latine, où la Chine a dépassé les États‑Unis comme principal partenaire commercial et source de financement. Godement estime qu’au plan commercial, les Chinois ont pris une avance certaine.

À Pékin, Donald Trump est aussi perçu comme une figure marquée par le déclin démocratique, mais la stratégie chinoise inclut une présence politique et stratégique croissante, notamment par des coopérations militaires et des ventes d’armes. Cependant, la réaction de Trump est décrite comme isolationaliste et liée à son discours sur l’immigration, tout en visant à contrer l’influence de Pékin dans la région.

Pour conclure, Godement ajoute que, bien que certains responsables en Chine puissent ridiculiser l’ancien président, une partie des réseaux d’influence voit en lui une vision générale du déclin de la démocratie.

Propos recueillis par Eric Guevara-Frey/hkr

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